Analyse du marché de l’emploi : l’entreprise privée licencie en grand

Le diable est dans les détails paraît-il, et il semble bien que les très mauvaises nouvelles s’y cachent également.
Statistique Canada annonce vendredi que le Canada a perdu 11 000 emplois en août. Ça, c’est la bonne nouvelle! Et celle relayée par tous.
Mais tout étant relatif, comme nous l’a si brillamment enseigné Albert Einstein, ce qui constitue vraiment une mauvaise nouvelle en août, c’est plutôt la perte de 112 000 emplois dans le secteur privé.
Un-un-deux, zéro-zéro-zéro…
Ce serait, de tout temps, la plus importante perte d’emplois mensuelle dans le secteur privé, affirme le correspondant au Canada du Wall Street Journal, Paul Viera.
Heureusement pour le gouvernement, 87 000 personnes de plus se sont déclarés «travailleurs autonomes» (pas loin d’un record mensuel, aussi) et le secteur public comptait 14 000 personnes de plus à son emploi. Ce qui permet de dire qu’en août, finalement, il n’y a eu que 11 000 emplois perdus, il y a même 10 000 chômeurs de moins, puisque 21 000 personnes ne figurent plus dans la population active, parties à la retraite ou tout simplement découragées.
Si cela reflète la réalité, il s’agirait d’une méchante correction, par rapport à juillet, alors que l’entreprise privée créait 54 000 emplois. Mais comme cette perte d’emplois astronomique survient moins d’un mois après la «révision» des chiffres de juillet par Statistique Canada et son aveu d’erreur, il faut demeurer suspicieux face à une telle donnée. Si les choses peuvent trop belles pour être vraies, elles peuvent aussi être trop laides pour être vraies.
Comment interpréter la situation? Regardons la tendance : en incluant les pertes d’août, le privé a coupé 3 600 emplois PAR MOIS depuis un an. En les excluant ça donne plutôt une moyenne de + 4 500.
Qu’est-ce que cela dit? À l’échelle d’un pays de la taille du Canada, c’est pratiquement rien. Alors, à la lumière de ce qui se passe dans le secteur privé, l’économie canadienne va :
a) mal;
b) très mal.
Réponse : en octobre, pour les données du mois de septembre, question de voir si les chiffres d’août n’étaient qu’une anomalie statistique, ou le début d’une très mauvaise tendance.
Au Québec
Au Québec aussi, la théorie de la relativité des nouvelles s’observe à merveille.
La bonne nouvelle, c’est qu’il y avait 17 000 chômeurs de moins en août par rapport à juillet. La moins bonne, c’est que 15 000 d’entre eux ne se sont pas trouvés de job, ils ont juste abandonné l’idée même d’en avoir une.
Et encore une fois, l’emploi à temps plein pique du nez dans la province. Une quatrième fois au cours des cinq derniers mois. En août 2014, les 4 362 000 Québécois en emploi ou en recherche d’emploi (13 000 de plus en un an) ont 32 000 jobs à temps plein de moins à se partager qu’en août 2013.
Depuis le début de l’année, le Québec compte 21 000 emplois de moins. Et c’est grâce à l’austérité* chez nos gouvernements : n’eut été de l’ajout de 26 000 salariés dans les administrations publiques, ça aurait été une perte de 47 000.
Et pourtant, au gouvernement, on salue le taux de chômage qui passe de 8,1 % en juillet à 7,7 % en août. Mais le ministre des Finances Carlos Leitao ne s’y trompe pas : il y a des dizaines de milliers de contribuables en moins sur lesquels il ne peut plus compter pour boucler son budget. C’est pourquoi les rumeurs du dépôt d’un mini-budget en novembre ont la cote dans la capitale…
*sarcasme