Combien gagne un employé municipal?

La question se pose dans le débat entourant le projet de loi 3, cette législation qui encadrerait les négociations en vue d’assurer la pérennité des régimes de retraite des syndiqués municipaux.
Les policiers, pompiers et autres cols bleus des villes du Québec reconnaissent jouir d’un filet de protection sociale pour leurs vieux jours nettement supérieur à celui des contribuables moyens.
Leurs chefs syndicaux refusent seulement qu’on salisse le lustre de la belle robe de ces belles vaches sacrées. Ils veulent croire qu’il y a moyen de les préserver dans toute leur splendeur, sans qu’eux passent à la caisse.
De combien on leur exigerait, notamment en cotisation supplémentaire à leur régime de retraite? «Plus de 6000 $ par année», affirme Yves Francoeur, le président de la Fraternité des policiers de la Ville de Montréal. Sans qu’on puisse vérifier ce chiffre, puisque la négociationn’a même pas eu lieu… En passant,un constable de ce corps de police, avec plus de 5 ans d’ancienneté, gagne en moyenne 80 000 $, lorsqu’il engrange quelques bonis prévus à la convention collective. Ça exclut, par contre, les avantages sociaux, dont la part de l’employeur au régime de retraite.
Le porte-parole de la Coalition syndicale pour la libre négociation, Marc Ranger, reconnaît, qu’en moyenne, les employés municipaux sont mieux rémunérés que les autres salariés.
Mais il a laissé entendre l’autre jour à LCN, lors d’une émission matinale, que si la rémunération des employés municipaux est effectivement plus élevée, selon les données officielles, ce serait à cause des cadres, et que les ouvriers et cols bleus recevraient plutôt nettement moins que ceux du privé.
Si c’était vrai, il faudrait que les chefs syndicaux municipaux soient de très mauvais négociateurs. Car, contrairement au secteur privé, les villes n’ont pas droit au lock-out, comme moyen de pression. Et contrairement au gouvernement, elles n’ont pas le pouvoir d’imposer des conditions unilatéralement par voie législative.
En d’autres mots, les syndicats municipaux manient des outils des négociations dignes des Transformers™, tandis que les villes n’ont des poèmes à la main pour se défendre.
Ce qui donne comme résultat… une rémunération moyenne nettement plus élevée que celle de leurs camarades du gouvernement du Québec, du gouvernement fédéral, et du secteur privé.
Voici quelques exemples, de rémunération directe et indirecte totale pour une année avec le nombre d’heures en moyenne travaillées, pour quelques postes d’ouvriers, notamment cités par Marc Ranger:
Conducteur de véhicules lourd :
Municipal : 68 200 $ / 1660 heures
Gouvernement du Québec : 49 110 $ / 1650 heures
Secteur privé syndiqué : 61 200 $ / 1800 heures
Secteur privé non-syndiqué : 49 500 $ / 2150 heures
Mécanicien véhicules lourds
Municipal : 78 100 $ / 1700 heures
Gouvernement du Québec : 54 700 $ / 1600 heures
Secteur privé syndiqué : 65 100 $ / 1800 heures
Secteur privé non-syndiqué : 64 500 $ / 1900 heures
Menuisier d’entretien
Municipal : 78 500 $ / 1700 heures
Gouvernement du Québec : 54 700 $ / 1700 heures
Secteur privé syndiqué : 73 600 $ / 1800 heures
Secteur privé non-syndiqué : 50 000 $ / 1800 heures
(Source : Rémunération des salariés, état et évolution 2013, Institut de la statistique du Québec)
Pour vous donner une idée de l’importance de la contribution des villes au régime de retraite des employés, le salaire que reçoit un menuisier municipal n’est pas de 78 500 $, comme indiqué ci-haut. Ce qu’on appelle sa rémunération directe s’élève plutôt à près de 55 000 $.
Par contre, sa rémunération indirecte, qui comprend la part de l’employeur à son budget santé et à son régime de retraite, s’élève à 23 000 $! On comprend qu’à ce niveau, nul besoin de s’acheter un seul dollar en REER afin de s’assurer des vieux jours. Tandis que le travailleur moyen québécois (plus de la moitié des Québécois), qui ne bénéficie pas d’un régime d’employeur, il doit investir au moins 10 000 $ par année, pour que ça ressemble un tant soit peu à un fonds de retraite… si les marchés le veulent bien.
Notez aussi le nombre d’heures travaillées, pour un salaire annuel supérieur : dans le cas d’un conducteur de véhicule lourd, il bosse l’équivalent de deux mois et demi de moins que le gars (ou la fille) du secteur privé non syndiqué (pour 19 000$ de plus)…