Il y a différentes façons de gagner sa vie avec sa voix : prof de chant, choriste, chanteur de noces ou… chanteuse de funérailles, comme Marie-Ève Beauchesne, qui exerce le métier depuis 15 ans. Entretien avec une chanteuse pour qui ce métier est loin d’être « juste une job ».

Chanteuse de funérailles, c’est quelque chose qu’on planifie ou qui arrive par accident?
Par accident ! Plus jeune, je rêvais d’être une grande chanteuse d’opéra… J’ai étudié le piano classique au cégep, puis j’ai suivi des cours de chant avec un professeur privé. C’est en chantant à la messe le dimanche que j’ai eu mes premières demandes pour chanter à des funérailles.

D’où viennent vos clients, aujourd’hui?
Ce sont les églises et les salons funéraires qui font appel à mes services. Et c’est par le bouche-à-oreille que j’ai développé ma clientèle.

À quoi ressemble votre quotidien?
Je travaille sur appel. Une semaine, je peux faire sept ou huit funérailles, une autre, seulement une. Ce n’est pas un horaire régulier. Mais comme je suis mère de deux jeunes enfants, ça me convient pour le moment.

Devez-vous pratiquer avant les cérémonies?
C’est sûr qu’il y a des vocalises à faire, pour maintenir la voix. Mais avec les années, je connais bien le répertoire. S’il y a un nouveau succès, je prends le temps de l’apprendre, mais ce n’est pas quelque chose de difficile.

Que chantez-vous?
À l’église, c’est surtout du chant classique. Ave Maria, Bach, parfois des airs d’opéra. Au salon, c’est dans le registre pop, au goût des familles. J’ai un faible pour Ginette Reno (L’essentiel), mais je m’adapte et je fais plusieurs styles.

C’est un métier qui vous plaît?
J’aime beaucoup ça ! Les funérailles, c’est le seul moment où les gens sont vrais. Ils sont près de leurs émotions. Les masquent tombent, et on peut avoir accès à qui ils sont vraiment.

Aussi, avec le chant, j’ai l’impression de les aider. Le chant, c’est réparateur, ça fait du bien à l’âme.

Y a-t-il des moments plus difficiles?
Ce qui est difficile, ce n’est pas de voir des gens qui ont de la peine ou qui sont tristes. Ça, c’est normal et c’est touchant. J’ai plus de difficulté quand il y a de l’amertume dans l’air. Quand il y a de l’agressivité ou de la rancœur entre les personnes qui assistent à la cérémonie.

Est-ce difficile de côtoyer la mort au quotidien?
Je ne trouve pas, non. Ça ramène à l’essentiel. Ça ramène les pieds sur terre. Et aussi, ça me rappelle que la vie est éphémère…

Des conseils, pour ceux qui aimeraient emprunter cette voie?
Suivre des cours de chant, avoir de bonnes bases. Car parfois, tu sais seulement la veille ce que tu vas chanter!

Je pense aussi qu’il ne faut pas voir ça juste comme une job. Il ne faut pas faire ça machinalement, comme si c’était une routine. Dans ce cas-là, les gens vont le sentir. Il faut être passionné et vraiment aimer ça. Autrement, on est mieux de faire autre chose. Par respect pour ceux qui vivent le deuil…