Faillite personnelle, pas professionnelle

Une faillite personnelle est-elle une tache indélébile sur son parcours professionnel? Pas nécessairement. Il peut s’agir d’un signe de résilience, d’audace, de tolérance au risque. Tout dépend aussi des leçons que vous aurez su tirer de cet incident de parcours.
Pour Éric Mallette, associé et vice-président au développement de l’équipe à La tête chercheuse, un grand cabinet de chasseurs de têtes montréalais, la faillite personnelle est presque une étape comme une autre dans la vie d’un candidat. À condition toutefois que celui-ci ait vraiment pris du recul par rapport à l’événement, qu’il se soit vraiment questionné sur ses raisons. Finalement, ce qui va distinguer une « bonne » d’une « mauvaise » faillite personnelle, ce sont les enseignements que la personne en aura retirés, bien plus que les circonstances qui l’ont poussé au dépôt de bilan.
Apprendre de ses erreurs
« Qu’est-ce que tu as appris de ça? En quoi cette épreuve t’a-t-elle fait grandir? Comment vas-tu t’y prendre la prochaine fois pour éviter que le scénario ne se reproduise? Voilà les questions que je pose à un candidat qui a connu cette situation », explique M. Mallette.
Pour lui, chaque histoire mérite d’être contée, entendue et comprise. « Je ne crois pas à la discrimination, explique-t-il. Pourquoi écarter d’emblée un CV intéressant à cause d’une faillite, sans même avoir cherché à en comprendre les raisons? »
Car il y a plein de cas « honorables » de faillites personnelles, estime M. Mallette. « Je vois souvent des entrepreneurs qui désirent retourner au salariat. Dans cette situation, je vais d’abord retenir de leurs parcours “voilà quelqu’un qui a eu assez de vision et de courage pour créer son entreprise” plutôt que “ça n’a pas marché”. Là où ça peut poser problème, c’est quand le candidat m’explique que tout le monde est à blâmer, sauf lui. »
Transparence ou pas?
Mettre la clé sous la porte ne serait donc pas une tare si l’on sait montrer que l’on a su gérer, et digérer, la crise de façon responsable. Mais encore faut-il pouvoir se rendre jusqu’à l’entretien pour le faire. Toute vérité est-elle donc bonne à dire sur son CV?
« Avoir des préjugés sur les faillites est encore répandu chez les recruteurs, reconnaît M. Mallette. Mais les mentalités commencent à évoluer dans le contexte actuel de rareté des ressources humaines. » Finalement, décider de faire état de sa faillite personnelle, c’est un peu comme décider d’indiquer ses passe-temps, considère-t-il. « Il faut le mettre si ça a une réelle importance pour vous, si vous pensez que cela vous définit. Si vous sentez aussi que vous pourrez faire valoir que vous en êtes sorti grandi, que vos interlocuteurs vont vous comprendre, alors foncez. »
De toute façon, « si ça offusque l’entreprise que vous ayez fait une faillite personnelle alors que vous vous sentez légitime, il y a déjà un problème de valeurs entre vous et votre employeur potentiel. Et voudriez-vous vraiment travailler pour un patron qui a des préjugés vis-à-vis de ça? », conclut-il.