par Peggy Bédard

Le slow eating, le slow parenting, le slow living… et maintenant le slow working. L’éloge de la lenteur fait son entrée dans le monde du travail : quels seraient les bénéfices de « prendre son temps » au boulot?

Travailler vite c’est bien, mais cela ne favoriserait pas la qualité du travail ou le bien-être personnel, bien au contraire. Avec la vitesse et la pression soutenue, viennent le stress et la surcharge de travail, des causes de nombreux épuisements professionnels, un problème de santé mental qui touche des milliers de Canadiens chaque année.

Myriam Jézéquel, chercheure et auteure de L’instant présent pour vivre plus sereinement, s’intéresse au slow working depuis plusieurs années et le définit comme « le fait de se réapproprier son emploi du temps en faisant un meilleur usage de celui-ci ».

Une approche qu’il ne faut donc pas confondre avec la paresse et la perte d’efficacité. Il faudrait plutôt voir le slow working comme une façon de prendre son temps pour en gagner, pour mieux gérer ses priorités et arriver à rééquilibrer son rythme de travail.

Réflexion et contrôle de l’attention
Selon Myriam Jézéquel, la pratique du slow working comporte plusieurs avantages. Il invite d’abord à se mettre en mode réflexion, plutôt qu’en mode réaction. « Une journée de travail est faite d’une foule de petites décisions qui peuvent avoir des répercussions sur la suite des choses. On prend de meilleures décisions en exerçant le recul nécessaire devant les situations, en s’accordant le temps de la réflexion plutôt qu’en cédant à la précipitation. »

Prendre son temps au travail permet aussi un meilleur contrôle de son attention. En alternant des périodes de concentration et de relâchement, on arriverait à mieux diriger son attention et à la maintenir dans le temps. Myriam Jézéquel note que « la pression continue au travail, la surenchère d’informations, les distractions technologiques, tout cela met à rude épreuve nos ressources attentionnelles, affecte notre résistance au stress et notre bien-être général ».

Qualité de présence et épanouissement
On perd donc bien du temps à courir après le temps. Mais le slow working permettrait d’apaiser le tout. Selon elle, « pendant que la société actuelle pousse les travailleurs à en faire toujours plus dans une logique de productivité, le slow working incite les gens à calmer le jeu en travaillant mieux dans une qualité de présence à soi, aux autres et à son environnement ».

Et s’évertuer au boulot comporte aussi des conséquences. Sous la pression de la performance, certains travailleurs craquent. Une autre bonne raison d’adopter le slow working, croit Myriam Jézéquel, car « il favorise l’épanouissement au travail en accordant de l’importance à la culture de satisfaction au travail, aux relations de travail harmonieuses, à un climat de respect et de confiance pour des bénéfices individuels et collectifs durables ».

En laissant plus de place au temps, on ouvre donc la voie à une foule d’avantages et de bénéfices concrets qui ne font qu’améliorer la qualité de vie. Travailler plus lentement pour faire mieux, mais aussi pour se sentir mieux et éviter les conséquences d’un épuisement professionnel, cela devrait convaincre quelques sceptiques.

« Si le slow working est dans l’air du temps, c’est parce que cette approche répond à une quête de sens, rappelle en terminant Myriam Jézéquel. Le moteur sous-jacent du slow working est de rendre au travail sa valeur et sa signification, au-delà des chiffres économiques. »