Après des lois favorisant l’égalité des traitements entre les sexes, faudra-t-il en adopter qui réprimeront la discrimination entre les générations? C’est que les preuves à l’effet que les jeunes générations sont moins bien traitées que leurs aînés lorsqu’ils avaient le même âge s’accumulent.

Cette fois-ci, un rapport publié mardi par le Conference Board démontre que l’écart de traitement entre les jeunes travailleurs et les plus âgés n’a jamais été aussi élevé. Et pourtant, en parallèle, l’écart du niveau de scolarisation suit une tendance inverse. Ce qui va contre toute logique.

400$ de moins par semaine!
Personne ne questionne le fait que les travailleurs âgés de plus de 50 ans gagnent en moyenne plus que les moins de 30 ans. Cela va de soi. Le problème, c’est que le revenu des plus de 50 ans a augmenté beaucoup plus rapidement depuis les années 80 que celui des moins des 30 ans.

Ainsi, l’écart entre le revenu des premiers et celui des seconds est passé de 47% dans les années 80 à 64% aujourd’hui. En argent sonnant, cela veut dire que pour chaque 1000$ payés aux plus vieux, on en payait 680$ aux plus jeunes. C’est maintenant 600!

Si elle persiste, cette tendance à l’inégalité pourrait à la fois limiter la croissance économique future et provoquer des conflits croissants entre les travailleurs plus âgés, qui sont mieux nantis, et ceux, plus jeunes, qui le sont moins, dit-on au Conference Board. «La génération de Canadiens qui se trouve aujourd’hui au sommet de l’échelle des revenus a longtemps lutté d’arrache-pied pour des principes comme l’égalité de salaire pour un travail de valeur égale. Or, les enfants de cette génération font maintenant face à des rémunérations inférieures et à des prestations de retraite réduites, même s’il s’agit du même travail chez le même employeur», confirme David Stewart-Patterson, vice-président du Conference Board et coauteur de ce rapport.

D’autres recherches confirment
En d’autres mots, les nouvelles générations d’adultes risquent d’être plus pauvres que les précédentes. Une première en Occident depuis la révolution industrielle du 19e siècle, hormis l’épisode de la Grande Dépression, dans les années 30.

Déjà dans une recherche publiée en 2005 (donc, avant la crise de 2007-2008), deux chercheurs réputés de Statistique Canada faisaient remarquer cet écart. On y notait que les entreprises offraient désormais des salaires et autres conditions moindres aux nouveaux embauchés, tout en maintenant le revenu de leurs travailleurs en place.

Aussi au milieu des années 2000, un professeur de l’Université de Rimouski a découvert qu’un diplômé universitaire de 25 ans gagnait à ce moment-là 1 000 $ de moins par mois qu’un diplômé universitaire de 1985.
Alors, l’étude Conference Board ne vient pas de nulle part. D’autant plus qu’elle est solide, sur le plan méthodologique. Elle repose sur 27 années de données sur l’impôt sur le revenu.

Pas tellement réputé pour son penchant à gauche, l’organisme prédit tout de même des troubles sociaux sérieux si la tendance n’est pas corrigée. «Cette tendance pourrait se révéler lourde de conséquences pour les employeurs, les syndicats, les gouvernements et les collectivités, ajoute David Stewart-Patterson. Si les gains des jeunes travailleurs restent à la traîne, on risque aussi de voir, au sein de notre société, des conflits croissants entre ceux, plus âgés, qui sont mieux nantis, et ceux, plus jeunes, qui le sont moins. »

So, so, so… qu’ils disaient, il y a 30 ans?