Un sondage de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréées montre que 1 travailleur sur 10 ne prendra pas de vacances en 2015. Quel sera l’impact sur sa carrière? Entrevue avec France St-Hilaire, universitaire spécialisée en communication et en santé au travail.

Workopolis: Quelle incidence peut avoir un manque de vacances sur notre santé?

F. S.-H. : Si on ne réussit pas à prendre de vacances, on devient plus sensible au stress, lequel peut contribuer au développement de troubles psychologiques (anxiété, épuisement professionnel), physiques (troubles digestifs, sommeil perturbé) ou comportementaux (consommation d’alcool et de drogues, agressivité). Au Japon, le phénomène des karoshis a même pris de l’ampleur pour cette raison : des employés travaillent parfois jusqu’à 18 heures par jour et meurent d’épuisement. Un jeune homme de 21 ans est aussi décédé d’un arrêt cardiaque aux États-Unis parce qu’il avait trop poussé ses limites physiques afin d’impressionner son nouvel employeur.

À quoi devraient ressembler des vacances bénéfiques?

La qualité des activités, soit celles qui offrent une expérience subjective agréable, joue un rôle important dans la capacité de se détacher du travail de façon physique et virtuelle, c’est-à-dire que si on a accès à ses courriels, il devient plus difficile de décrocher, comme le montre le sondage de l’OCRHA.

Les travailleurs devraient miser sur des activités relaxantes qui favoriseraient la diminution des symptômes de détresse psychologique et d’épuisement professionnel. Le sentiment de contrôle sur son temps, chose que beaucoup d’entre nous n’ont pas l’impression d’avoir assez durant une semaine normale, aiderait aussi au repos.

Enfin, même si on se sent coupable, il vaut mieux se faire plaisir pendant cette période au lieu de s’imposer des obligations comme les rénovations ou la visite de parents ou d’amis qu’on n’a pas eu le temps de voir au cours de l’année, sans quoi on risque de revenir au boulot dans le même état qu’avant de quitter.

Comment se traduit un manque de vacances dans le milieu de travail?

F. S.-H. : L’épuisement professionnel peut prendre plusieurs formes. On peut commencer à être cynique et à se détacher de son travail. Une phrase comme « Si je travaille comme un fou, ça ne change rien » n’est pas rare alors qu’on était autrement considérée comme très engagé. On peut aussi devenir impatient ou même agressif envers les collègues. En outre, plus on travaille de longues heures sans donner à son corps et à son cerveau la capacité de récupérer, moins on sera efficace. Une tâche qui prend normalement une heure en nécessitera quatre. Et s’ensuit un cercle vicieux : on se sent coupable de mettre autant de temps à réaliser une tâche, alors on travaille plus d’heures pour y arriver… On ressent en conséquence un manque d’accomplissement professionnel, ce qui augmente le stress.

Quelles sont les personnes qui sont les plus susceptibles de ne pas prendre de vacances?

F.S.-H. : Surtout les jeunes de 18 à 34 ans. Certains commencent un emploi et n’ont pas cumulé assez de congés ou ont changé plusieurs fois d’employeurs dans l’année, d’autres tentent de se démarquer. Comme ils récupèrent plus rapidement, ils surestiment souvent leurs capacités physiques. Les travailleurs autonomes sont également un autre groupe à risque en raison des périodes sans contrats qui les obligent à travailler davantage durant les autres mois.

Quelles stratégies devraient adopter les travailleurs qui n’ont pas la chance d’avoir des vacances?

F. S.-H. : Une façon consiste à prolonger ses fins de semaine. Lorsque ce n’est pas possible, il faut alors favoriser les moments de récupération le soir et la fin de semaine et augmenter la qualité des activités durant ceux-ci. Plus elles sont courtes, plus on doit s’arranger pour se faire plaisir en relaxant et en décrochant du travail.

 

Vacances estivales

Pour en savoir plus
http://www.portailrh.org/presse/2015/20150714_Infographie_Vacances2015.pdf

 

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