par Maxime Bilodeau

Avis aux techno-sceptiques : la technologie et, plus récemment, les robots ont créé plus d’emplois qu’elles en ont détruit dans les 144 dernières années, selon une étude surprenante réalisée par Deloitte.

En fait, la technologie serait carrément une « super machine à créer de l’emploi » (great job-creating machine), aux dires des auteurs de l’étude, quatre économistes de Deloitte. Pour arriver à cette conclusion, ces derniers ont fouillé dans des données issues des recensements en Angleterre et au pays de Galles depuis 1871. Ils ont ainsi pu étudier l’évolution de la main-d’œuvre au fil du temps dans certaines catégories d’emplois.

Ce voyage dans le temps leur a donc permis de constater que certains secteurs d’emplois manuels, comme ceux liés à l’agriculture et aux métiers manuels, ont ressenti durement l’arrivée des technologies et de la robotique. Par exemple, en 1871, 6,6 % de la main-d’œuvre en Angleterre et au Pays-de-Galle œuvrait dans le secteur de l’agriculture. Aujourd’hui, ce chiffre n’est que de 0,2 %, une baisse de 95 %. Un phénomène semblable se constate chez ceux et celles qui lavent le linge, tricotent, bref, effectuent des tâches répétitives.

Au contraire, les travailleurs du savoir, comme ceux œuvrant dans les milieux de l’éducation, de la santé ou des services, ont profité de l’avènement des technologies, nouvelles et anciennes. Et pas juste un peu : entre 1871 et 2015, l’étude fait état d’une augmentation d’effectifs en enseignement de 580 %! Fait surprenant : le nombre de tenanciers de bar se serait multiplié par quatre depuis 1951. Le nombre de coiffeuses a lui aussi explosé : le rapport de 1 pour 1793 personnes en 1851 s’est abaissé à 1 pour 287 aujourd’hui.

Le pouvoir du… pouvoir d’achat
Cela s’explique, disent les auteurs, par l’enrichissement collectif des masses, un phénomène lui aussi dû à l’amélioration constante de la technologie. « Elle a haussé le pouvoir d’achat, ce qui a comme effet de créer de nouveaux besoins, donc de nouveaux emplois », expliquent-ils. En fin de compte, le bilan entre la création et la destruction d’emplois est donc plutôt positif et le marché de l’emploi regorge de postes exigeant davantage de connaissances et de prises de décision.

Aux yeux de Luc Vanden-Abeele, conseiller en vigie d’affaires et recherche marketing chez Axium inc., l’étude de Deloitte paraît « exhaustive », quoique nombre de ses thématiques soient « assez connues ». « Ils ne réinventent pas la roue, admet-il. Les grandes lignes, aussi bien tracées soient-elles, sont connues. »

Son principal mérite, poursuit-il, c’est d’illustrer la métamorphose du marché de l’emploi dans un dernier siècle et demi très riche en innovations technologiques. « Oui, il y a des gens qui perdent leur emploi à cause de la technologie et des robots, mais il y en a d’autres qui s’en trouvent pour les mêmes raisons. C’est un phénomène de déplacement de l’emploi », explique-t-il.

Selon lui, nous devons saluer l’avènement des nouvelles technologies, pas les craindre. « En général, les pays qui investissent le plus en robotique ont des taux de chômage plus faibles. On ne le dit pas assez, mais certaines entreprises survivent grâce à leurs investissements dans ce domaine. Autrement dit, ce sont des emplois sauvés par les robots! »