Pas forcément facile de revenir à ses premières amours professionnelles après plusieurs années à s’essayer dans un autre domaine. Comment justifier cet aller-retour auprès des recruteurs?

Que ce soit par nostalgie de votre ancienne activité ou parce que les perspectives sont complètement bouchées dans votre nouveau secteur, votre volte-face professionnelle pourrait susciter beaucoup de questions chez les employeurs. « Et il faudra être capable d’y répondre de façon à la fois stratégique et sincère », explique Mathieu Guénette, directeur des services professionnels chez Brisson-Legris, un important cabinet montréalais de conseil en gestion de carrière. « C’est un peu comme le gars qui quitte sa blonde, puis qui veut se remettre avec. Il a vraiment intérêt à pouvoir se justifier! », plaisante-t-il.

Le syndrome de la girouette
Vu la délicatesse du message à faire passer, on peut essayer de montrer efficacement sa volonté de revenir à son domaine d’origine dans une simple lettre de présentation. « Sauf que cela risque fort de sonner comme une insatisfaction dans l’ancien, mais aussi dans le nouveau métier que vous exercez. Et l’interrogation qui viendra immédiatement à l’esprit du recruteur au sujet de votre emploi d’avant, c’est : il ou elle veut revenir, d’accord, mais cette insatisfaction est-elle toujours là? Pourquoi la situation aurait-elle changé? »

Autant de questions qui, sans réponses convaincantes et immédiates, risquent fort de faire atterrir votre CV dans la filière 13.

Mieux vaut en parler
Aussi, au-delà d’une lettre de présentation, l’objectif ultime serait de trouver une oreille auprès de laquelle défendre vos choix de carrière atypiques, selon M. Guénette. Pour obtenir cette rencontre exploratoire, mieux vaut ne pas annoncer trop clairement la couleur de ce qui pourrait ressembler à des valses-hésitations : le monde de l’entreprise n’aime pas les complications. « L’idéal, c’est toujours de connaître quelqu’un dans le secteur, de pouvoir invoquer le lien affectif pour aller rencontrer la personne en lieu neutre, en allant dîner avec elle par exemple. »

Si vous n’avez pas cette chance, il faudra trouver un cheval de Troie dans l’entreprise visée. « Vous devez avoir une raison qui justifie que vous vous adressiez à cette personne en particulier, vous être documenté sur elle et son travail, lui faire sentir qu’elle n’est pas qu’une personne parmi des centaines d’autres contactées à la chaîne. Quand on s’adresse à tout le monde à la fois, personne ne se sent concerné », rappelle M. Guénette.

Misez sur vos nouvelles expériences
Une fois face à un potentiel employeur, la partie n’est pas encore gagnée. « Attention aux réponses toutes faites du style : “J’avais besoin de nouveaux défis”. Les gens des ressources humaines ne sont pas nés de la dernière pluie. Essayez de faire valoir que vous êtes parti pour mieux revenir. »

La règle d’or, c’est bien évidemment de faire comprendre que ce petit tour hors des sentiers battus vous a été bénéfique, comme il le sera pour l’entreprise.

Si par contre votre tentative est un véritable échec, soyez capable de reconnaître votre erreur. « La sincérité est toujours très importante », considère Mathieu Guénette. En plus, montrer que vous savez accepter les revers avec philosophie peut jouer à votre avantage.

« Il faut faire valoir la pertinence de cette expérience », insiste M. Guénette. « Des compétences, c’est transférable. Même si votre ancien et votre nouveau domaine sont éloignés, il existe des passerelles. » Par exemple, il est toujours utile pour un ingénieur d’avoir appris à communiquer plus efficacement. Un bémol toutefois, dans les nouvelles technologies où tout va très vite, votre retour risque d’être franchement compliqué si vous ne vous êtes pas tenu à jour, ou carrément remis à niveau.

Et reprendre des études pour se perfectionner ou se refaire des contacts ? « Il y a autant de cas de figure que de personnes, de parcours et d’entreprises », rappelle M. Guénette. Mais arrivé à ce stade, à défaut de l’avoir fait avant de changer de carrière, il peut être utile de prendre les conseils d’un expert en gestion de carrière pour soupeser les risques et les avantages d’une telle démarche. Histoire ne pas se retrouver dans la même situation dans quelques années…